Inflation réglementaire en 2018 : aucun professionnel de la finance n'y échappera !
Il existe une certaine constance dans la défiance des professionnels de la finance à l’égard de la régulation et de son bras armé, la supervision. Tel est le constat de la troisième édition du baromètre annuel de la régulation financière réalisé par le cabinet de conseil indépendant français TNP Consultants et le tout nouveau Cercle de la Régulation et de la Supervision Financière (CRSF) qui ont interrogé 85 professionnels du secteur de la banque et 42 professionnels de l’assurance entre novembre et décembre 2017.
Résultat ? « A trop vouloir contraindre les banques et les assureurs, leur rentabilité s’effondre peu à peu, ce qui les fragilise et les pousse à rechercher des sources de profit alternatives », constate Guillaume Cazauran, Partner TNP Consultants et Vice-Président du CRSF. « À trop orienter les investissements de ces industriels de la finance, on élimine un facteur majeur de diminution des risques, qui n’est autre que la diversité dans la gestion des placements. Enfin, à trop enserrer les relations contractuelles financières dans un carcan réglementaire, on favorise l’émergence d’acteurs disruptifs non régulés ».
Aujourd’hui, personne donc ne peut affirmer que cette escalade réglementaire puisse prémunir les financiers contre une nouvelle crise et diverses menaces demeurent. Il est néanmoins certain que l’uniformisation réglementaire est néfaste. Ainsi, la solution passe par davantage de diversité des modèles de financement et par une meilleure articulation des règles entre échelons local et international, révèle l'étude.
Tous les banquiers impactés
Les réglementions prudentielles ont fortement renforcé les besoins en ressources rares que sont les capitaux et la liquidité. Les réglementations MiFID2, EMIR et T2S entraînent un mouvement inéluctable des infrastructures de marché afin que les acteurs adaptent leurs modèles opérationnels pour être en capacité de transformer leurs pratiques. Le tableau ci-dessous montre comment la réglementation a impacté les différents domaines dans le secteur de la banque en 2016 (en vert) et en 2017 (en rouge) :
En 2017, si les banquiers estiment que la réglementation est efficace pour maîtriser les risques de réputation et systémique, ils sont moins convaincus de l’efficacité de la régulation sur le risque de marché. Globalement, les acteurs bancaires restent moyennement convaincus de la cohérence de la régulation (au contraire des assureurs pour lesquels elle ne fait aucun doute).
« Nous avons introduit cette année des questions sur les relations entre les superviseurs et les industriels de la finance », explique Guillaume Cazauran. « Un certain malaise ou tout le moins un manque de maturité dans leurs interactions ressortent clairement du dépouillement des questionnaires ». Les banquiers qui ont pris conscience de la complexité du paysage de la régulation jugent donc plus durement le niveau de coordination des régulateurs que la cohérence des textes.
Afin d’être mieux associés par le régulateur aux nouvelles réglementations, ils plébiscitent : la nécessité de réaliser des études ex-ante (exercice de simulation) et ex-post (exercice de recalibrage), le besoin de disposer du temps nécessaire à la mise en oeuvre des textes. Sans oublier la prise en compte des nombreuses évolutions technologiques auxquelles l'industrie financière est exposée.
« Les premières initiatives des régulateurs pourraient davantage renforcer la transparence des opérations liées aux crypto-monnaies », concluent Julien Le Goueff et Gérald Voitot, respectivement Consultant et Partner chez TNP. A ce sujet, l’AMF vient de publier un communiqué ce jeudi dans lequel elle considère que l’offre de dérivés sur crypto-monnaies nécessite un agrément et est interdite à la publicité par voie électronique.
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