Voici les nouvelles priorités de recrutements pour 2018, banque par banque...
Vous voulez travailler pour une grande banque d'investissement en 2018 ? Voici où vous avez le plus de chances (ou pas) d'être recruté, sur la base des déclarations faites à l'occasion de la publication de leurs résultats du premier trimestre 2018 (sachant que pour Natixis et CACIB, il faudra patienter encore un peu pour en savoir plus sur leurs intentions, les deux banques françaises devant publier leurs résultats la semaine prochaine)...
Bank of America : ajout de personnel à Dublin / poursuite des recrutements de professionnels service clientèle pour renforcer la couverture du marché local aux U.S. / dépenses technologiques à tout-va
Si vous travaillez pour Bank of America, Dublin est la destination du moment. Après avoir choisi la capitale irlandaise comme base européenne post-Brexit, BoA a transféré en septembre 2017 l'ancien CFO Bruce Thompson en Irlande pour y installer son nouveau hub européen. Celui-ci est en train de mettre sur pied son équipe de direction : il a nommé cette semaine huit nouveaux dirigeants, dont George Carp, un managing director vétéran dans les marchés de capitaux. Bruce Thomson prévoit de transférer 125 personnes de Londres à Dublin à partir de juillet. Même si celles qui refusent de le suivre risquent de perdre leur job, il restera certainement des places vacantes à Dublin qui seront pourvues par des recrutements externes.
A défaut de travailler pour BofA à Dublin, vous pouvez toujours travailler pour BofA à Dallas. À l'instar de Goldman Sachs, la banque a pour ambition d'investir dans des «banquiers locaux pour les marchés locaux» et indique poursuivre ses efforts dans ce domaine.
La banque américaine augmente par ailleurs les dépenses en technologie et pourrait bien être tentée d'investir dans les professionnels de la vente et du trading actions suite à l'augmentation annuelle de 38% sur un an des revenus de la division actions au premier trimestre 2018.
Barclays : recrutements au ralenti, mais des cadres seniors continuent d'être embauchés, en particulier dans les métiers actions aux U.S. / poursuite des investissements technologiques / poursuite de la réallocation du capital et du renforcement du bilan
Il y a de bonnes et mauvaises nouvelles chez Barclays. La mauvaise nouvelle est que si vous espériez occuper un poste senior, la banque britannique a indiqué que la reconstruction de l'équipe de direction de ses activités de marchés était maintenant terminée. La bonne nouvelle est que Barclays semble néanmoins toujours recruter (malgré le licenciement de 100 directors et managing directors dans sa banque d'investissement en janvier).
Aux États-Unis, quatre managing directors en recherche actions ont d'ores et déjà été recrutés cette année (David Strauss pour l'aéronautique, Steve Valiquette pour la santé, Julian Mitchell pour l'industrie, Eric Beaumont pour l'électricité et les services publics). Au Royaume-Uni, la banque a embauché Emmanuel Cau à la tête de sa stratégie d'actions européennes. Ces cinq recrues seniors restent bien en-dessous des 40 MD's embauchés l'an dernier dans la division banque et marchés, mais c'est toujours mieux que rien...
Les nouvelles recrues sont l'œuvre de Stephen Dainton, ancien banquier du Credit Suisse, qui gère désormais l'activité actions mondiales de Barclays. Cependant, les actions ne sont pas le seul domaine d'intérêt de Barclays. La technologie reste un domaine d'intérêt et la banque affirme que c'est particulièrement vrai 'en raison du sous-investissement relatif dans les capacités de trading électronique'. Le mois dernier, le CEO Jes Staley a déclaré que Barclays était à mi-chemin dans la 'réingénierie' de ses plates-formes de trading électroniques, jusqu'à présent centrées sur les devises et les taux mais avec encore des efforts à faire dans les actions.
La plate-forme dérivés actions U.S. est en cours de reconstruction après les départs d'effectifs en 2017. Barclays alloue £10bn (11Mds€) d'actifs pondérés en fonction du risque aux activités de trading à rendement élevé, ce qui augmentera son rendement sur capitaux propres. En septembre dernier, Jes Staley, a déclaré que Barclays prévoyait de se concentrer sur le prime brokerage, les actions et le crédit.
BNP Paribas : poursuite d'une croissance des revenus d'environ 5% dans la BFI / poursuite de l'automatisation / investissement dans la compliance et le contrôle
BNP Paribas a de grands projets pour sa division CIB et le fait savoir. Dans son plan "Stratégie 2020", elle s'est fixée comme objectif une croissance d'environ 5% sur l'activité global markets d'ici 2020.
Malheureusement, cela ne tient pas compte du premier trimestre de 2018 qui a vu les revenus FICC baisser de 31% et les revenus actions de 20% sur un an. Néanmoins, la banque française a insisté sur le fait que les choses vont s'améliorer et que ses activités U.S. - où Jason Yang a été recruté comme responsable de la structuration crédit - ont bien performé.
Mieux encore : dans une note récente, des analystes de Deutsche Bank indiquent que les coûts ont été particulièrement bien maîtrisés dans l'activité Global Markets, et que les bénéfices de ces coûts commencent à apparaître.
Par ailleurs,BNP continue de 'renforcer ses systèmes de contrôle interne' (ce qui dans le passé a conduit à de nombreux recrutements). Elle automatise également les process et se lance dans une «transformation digitale» en vue de réaliser 1,1 milliard d'euros d'économies cumulées et récurrentes sur l'ensemble de la banque cette année, 1,8 milliard d'euros l'année prochaine et 2,7 milliards d'euros en 2020 - dont un tiers concernera CIB.
Lors de la dernière conférence téléphonique aux investisseurs, le directeur financier Lars Machenil a déclaré que la BNP était en train d'automatiser «200 process et d'implémenter trois projets end-to-end» impliquant «des process de crédit, ForEEx cash et clients embarqués ». Attendez-vous par conséquent à des recrutements dans la technologie et la réingénierie digitale.
Citi : poursuite des recrutements ciblés dans les actions voire le macro trading / "re-engineering" des fonctions support
Sous l'impulsion de son responsable mondial actions Murray Roos, la banque américaine embauche depuis plusieurs années dans la vente et le trading actions. En mars, par exemple, elle a recruté Michela Ferrulli de Bank of America Merrill Lynch comme responsable des ventes et du trading actions pour l'Europe centrale et orientale, le Moyen-Orient et l'Afrique (CEEMA). Un recrutement qui vient s'ajouter à l'arrivée l'an dernier de Christophe Pochartt de BNP Paribas en tant que responsable des ventes de dérivés actions en Amérique du Nord, ainsi que de diverses nominations en cash execution.
Lors de la dernière conférence téléphonique aux investisseurs du premier trimestre, le CEO Michael Corbat a salué la robustesse de la division actions de la banque, qui a fortement progressé au cours du trimestre grâce à ses activités cash, dérivés, delta one et prime finance. Le directeur financier de Citi, John Gerspach, a déclaré que la banque était particulièrement fière de sa division de macro-trading, très orientée vers les clients coporate et donc immunisée contre les faibles volumes de trading lors des périodes de faible volatilité, lorsque les clients institutionnels se raréfient.
Mais ce n'est pas tout concernant la croissance chez Citi. John Gerspach avait auparavant déclaré précédemment que la banque avait cette année l'intention de "reengineer des fonctions globales" comme la conformité, la finance et le risque. Citi a déjà déclaré vouloir réduire de 70 points de base les dépenses de la banque d'investissement en transférant le personnel dans des endroits à faible coût.
Credit Suisse : restructuration presque terminée / pause dans les recrutements actions / poursuite de la réduction des sous-traitants / recherche de profils en banque privée spécialisés dans le cross-selling clients
Sous l'impulsion de Mike Stewart, le responsable mondial actions qu'il a recruté auprès d'UBS fin 2016, Credit Suisse a lui aussi développé sa division actions, aspirant à ce que la banque suisse atteigne le top 5 mondial du trading actions. Lors de l'appel téléphonique du premier trimestre, son CEO Tidjane Thiam a déclaré que CS avait investi dans les talents spécialisés dans les actions et "rafraîchi la franchise" de son activité dérivés actions.
Malheureusement, toutes ces embauches ont été coûteuses. Les résultats de l'activité de Credit Suisse à Londres, qui détaille les P&L par activité, montrent que l'activité dérivés actions a réalisé une perte de 76 M$ en 2017. A cela s'ajoute une relative faible performance de Credit Suisse dans les activités actions au premier trimestre (revenus en hausse de 7% contre + 30% chez les concurrents). Autant d'éléments qui expliquent les différentes déclarations de Tidjane Thiam selon lesquelles CS a fini de recruter dans les actions pour le moment et attend maintenant des résultats.
Tout en renforçant ses effectifs actions, Credit Suisse continue de se restructurer. Tidjane Thiam a déclaré que la banque en était désormais au 9ème trimestre de son processus de restructuration de 12 trimestres et prévoit d'accélérer les changements cette année. La réduction du nombre de sous-traitants et de fournisseurs externes reste au cœur de l'initiative de réduction des coûts du Credit Suisse : au cours des deux dernières années, la banque est passée de 20.000 fournisseurs externes à seulement 10 000.
Lors de sa journée investisseurs en novembre dernier, CS a indiqué qu'elle transférait des emplois hors des centres d'affaires aux coûts élevés (comme Londres) vers des centres à faible coût (comme Wroclaw), automatisait les emplois en compliance et investissait dans l'intelligence artificielle. Jusqu'à 45% des effectifs de conformité et de contrôle devraient être éliminés grâce à la «réingénierie des processus» et à la «digitalisation».
Le meilleur endroit pour travailler chez Credit Suisse est sans doute la division ITS - une joint-venture entre les marchés mondiaux, la gestion de fortune mondiale et la Swiss Universal Bank. ITS vend des produits de marchés mondiaux à des clients privés de gestion de patrimoine et connaît une croissance particulièrement forte. C'est aussi le projet favori de Tidjane Thiam.
Deutsche Bank : lacunes à combler dans le macro trading / potentiel de renforcement du corporate finance européen / licenciements aux États-Unis et en Asie
Il va sans dire que Deutsche Bank connaît une période de changement sous la direction de son nouveau CEO Christian Sewing qui a promis une forte réduction des coûts dans la banque de financement et d'investissement parallèlement à l'embauche dans certains domaines clés.
Le besoin d'embauche le plus évident chez Deutsche Bank est dans le macro trading européen. Ici, la banque allemande a des trous dans la raquette depuis le départ de Sam Wisnia et de son adjoint Kal El-Wahab pour le hedge fund Eisler Capital. Des places sont encore à prendre étant donné que la macro européenne est l'un des domaines que Christian Sewing a déclaré vouloir renforcer. Celui-ci a également déclaré son intention d'orienter la banque vers les clients allemands et européens en corporate finance, suggérant la possibilité d'embaucher des senior relationship managers en Europe. Dans le même temps, les relationship managers déjà existants qui se concentrent exclusivement sur les clients américains et asiatiques sont menacés : le bureau de la banque à Houston a déjà été fermé et l'équipe mondiale pétrole et gaz est partie.
Deutsche a déjà commencé à réduire ses activités aux États-Unis, où des rumeurs circulent selon lesquelles 20% du personnel pourrait partir. Le pire endroit où travailler chez DB sont les actions U.S qui sont en cours de révision et pourraient être considérablement réduites. DB quitte également le repo trading U.S existant et transfert certains employés à Londres. À l'instar du Credit Suisse, Deutsche réduit les sous-traitants IT, en partie en les transformant en employés : 1.400 sous-traitants ont ainsi été «internalisés» l'an dernier.
Goldman Sachs : embauche dans la division 'strats' / recrutement de banquiers locaux à même d'établir des relations avec des corporates
Goldman Sachs recrute dans «strats» - sa propre marque de finance quantitative. Lorsque le CEO Lloyd Blankfein a précisé en février les intentions d'embauche de la banque, il a souligné son appétit pour les stratèges et les ingénieurs pour construire et pérenniser la technologie qui gère la banque. En particulier les quants et les ingénieurs capables de développer le système électronique de trading actions dont il essaie de combler le retard par rapport à Morgan Stanley. La banque est particulièrement concentrée sur Marquee, projet favori du CFO Marty Chavez, qui doit rendre accessible aux clients la database risques et pricing SecDB. En avril, 60 offres d'emplois concernant Marquee sont parues...
Dans le même temps, Goldman continue de poursuivre la stratégie définie l'an dernier par l'ancien COO Harvey Schwartz, et de trouver de nouveaux clients, en particulier dans le secteur corporate. Au cours de l'appel téléphonique du premier trimestre, Chavez a déclaré que Goldman n'avait atteint que 500 des 1.000 nouveaux clients ciblés à ce jour, et qu'il avait déjà embauché quelques banquiers seniors pour atteindre les objectifs. La banque continue également de dépenser et d'embaucher massivement dans la technologie et Chavez a désigné la cyber-sécurité comme un domaine prioritaire.
J.P. Morgan : recrutement en technologie / embauche en Asie / recrutement sélectif de banquiers seniors
Certes, toutes les banques dépensent pour la technologie, mais J.P. Morgan récolte la palme. La banque américaine a en effet indiqué qu'elle dépensera 10,8 milliards de dollars pour la technologie cette année, contre 9,5 milliards de dollars l'an dernier, dont 5 milliards iront à de nouveaux projets. JPM emploie déjà 50.000 informaticiens, mais en veut davantage. La transformation numérique semble être un bon endroit : elle est au cœur des ambitions de J.P.M et il n'y a actuellement que 2.500 personnes dans cette équipe. J.P. est ouvert à l'embauche d'informaticiens non financiers : Daniel Pinto, responsable de la banque de financement et d'investissement, a noté que 30% des embauches technologiques chez J.P. Morgan en 2017 n'avaient pas d'expérience dans la banque. Néanmoins, J.P. Morgan a un appétit avéré pour les inforrmaticiens de très haut niveau issus d'autres banques.
Loin de la technologie, Daniel Pinto a laissé entendre que J.P. Morgan pourrait embaucher dans le fixed income en Asie, le macro marchés émergents et des finances publiques. Au cours de la journée investisseur de la banque, le CEO Jamie Dimon a déclaré que J.P. Morgan voulait également embaucher des banquiers seniors dans des "zones ciblées".
Morgan Stanley : vente et trading suffisamment calibrés / moins besoin de voice traders qu'auparavant
Le miracle des ventes et du trading de Morgan Stanley est tombé un peu à plat au premier trimestre, quand la banque a été dépassé par Goldman Sachs. Cela peut être la raison pour laquelle le CEO James Gordman a indiqué que les activités de trading et de vente étaient suffisamment calibrées. Le CFO Jonathan Pruza a relevé que la banque avait de moins en moins besoin de voice traders alors que le trading électronique s'impose – même si cela s'applique à toutes les banques, pas seulement à Morgan Stanley.
SocGen : démarrage du plan stratégique / renforcement de la couverture commerciale des activités de marchés en Europe et Asie-Pacifique / recrutement d'environ 150 data experts en 2018
Le démarrage de la mise en œuvre du plan stratégique Transform to Grow 2018-2020 intervient dans un contexte où la banque a pâti de mauvaises performances dans les activités de marché. Séverin Cabanes, le nouveau patron de SGCIB dont la nomination a été annoncée la veille de la publication des résultats et qui remplacera le poste laissé vacant par Didier Valet, a donc du pain sur la planche....
Ce qui n'empêche pas les recrutements d'avoir lieu. SGCIB a ainsi annoncé ce mois-ci le renforcement de la couverture commerciale de ses activités de marchés en Europe, avec la création d’un nouveau poste de responsable de la vente et la nomination d’un nouveau responsable de la vente activités de marchés pour la région Asie-Pacifique.
Côté IT, Société Générale, chez qui la donnée est un actif stratégique, prévoit de recruter près de 150 experts de la donnée en 2018. Data scientists, data engineers, data quality managers, business data designers, IT data architects et autres chief data officers seront donc les bienvenus.
UBS : recrutements massifs dans la gestion de fortune en Asie et aux U.S. / quelques recrutements dans les M&A aux U.S. / quelques licenciements dans le fixed income EMEA
Le gros des recrutements chez UBS ne concerne pas la banque d'investissement, mais la banque privée en Asie où 40 nouveaux relationship managers ont été recrutés rien que sur les trois premiers mois de l'année. Qui plus est, l'Asie n'est pas la seule concernée : lors de la conférence téléphonique aux investisseurs au premier trimestre, le CEO Sergio Ermotti a souligné son intention de développer également les activités de gestion de patrimoine de la banque aux États-Unis.
Si la banque privée en Asie n'est pas votre tasse de thé, UBS a également annoncé son intention de recruter de nouveaux banquiers M&A aux Etats-Unis (dans ce cas attendez-vous à assister à un grand nombre de réunions clients du fait que UBS exige une hausse de la productivité chez ses banquiers). Moins encourageant, UBS a réduit le fixed income EMEA (en particulier, le desk obligations d'État). Cependant, elle indique investir dans l'exécution électronique des actions.
Comme la plupart des banques. UBS augmente également ses dépenses technologiques tout en réduisant les sous-traitants au profit de créations de postes technologiques en interne.