Ce que les banquiers pensent du mouvement des gilets jaunes...
Les banquiers vont-ils finir par rejoindre le mouvement des gilets jaunes ? Toujours est-il que pour la première fois depuis 10 ans, les syndicats de BNP Paribas au grand complet ont appelé mardi à une grève des 40.000 salariés de la banque de détail en France, la banque de financement et d'investissement (CIB) en France, ainsi que les fonctions centrales du groupe, selon Les Echos.
Au centre de la grogne, les négociations annuelles obligatoires (NAO) qui ont achoppé sur l'absence de mesures collectives d'augmentations des salaires. Les revendications portent aussi sur le niveau des effectifs, la qualité de vie au travail ainsi que les objectifs de transformation qui touchent aussi la CIB, avec une réduction d'environ 650 postes d'ici à fin 2018. Le DRH du groupe BNP Paribas, Yves Martrenchar, entend cependant « poursuivre le dialogue » et « apporter des réponses ».
Ce qui n'est pas sans rappeler le mouvement des gilets jaunes et son cortège de revendications. Que pensent d'ailleurs les professionnels de la finance de ce mouvement ? Pour le savoir, nous avons interrogé plusieurs banquiers et recruteurs en finance afin qu'ils nous disent s'ils se sentaient proches ou pas de ce mouvement qui suscite encore l'approbation de 72% des Français malgré les violences du week-end qui ont notamment ciblé les banques à Paris comme en province (SocGen fait, par exemple, état d’une douzaine d’agences touchées dans l’Hexagone) ainsi que - peu le savent - le Palais Brongniart.
« On en parle beaucoup à la City »
Certains banquiers n'ont pas souhaité s'exprimer, se contentant de dénoncer les violences. D'autres refusent catégoriquement de soutenir le mouvement des gilets jaunes, l'un d'entre eux évoquant une « vision stéréotypée du monde de la finance et des banquiers de la part de certains gilets jaunes accentuée par le fait que le président Macron soit lui-même un ancien banquier d'affaires ».
D'autres au contraire invitent à la compréhension. « Les professionnels du secteur financier doivent entendre ce cri de détresse des couches populaires. Ils doivent être solidaires d’une population qui exprime le besoin d’une meilleure cohésion nationale et d’une démocratie mieux représentée », nous explique un sous couvert d'anonymat un recruteur en finance à Paris qui préconise de « réfléchir à des concertations citoyennes et des actions symboliques pour alléger la tension populaire ».
En attendant, la plupart des banquiers que nous avons intérrogés se disent être préoccupés par l'image que ces violences à Paris renvoient à l'international. « Tous les efforts de ces dernières années fournis par le président Macron et la place financière visant à faire de Paris une vitrine post-Brexit risquent d'être annihilés », redoute un banquier senior parisien ayant lui aussi souhaité conserver l'anonymat.
A la City, certains se montrent bien plus virulents. « L'image massacrée de l'Arc de Triomphe a fait le tour des desks de la City », témoigne ainsi dans nos colonnes un financier français basé à Londres et rapporte ce qu'il a entendu autour de lui. « Or, quelle société voudrait placer son enseigne à Paris après un carnage pareil ? C'est déjà très compliqué pour les entreprises étrangères de naviguer à travers le tissu administratif français. Fallait-il ajouter le risque de casse et de guerre civile en plus de cela ? ».
Enfin, il en est qui préfèrent minimiser l'impact négatif des images de certains beaux quartiers de Paris en feu qui ont fait le tour du monde. « Attentats, grèves à répétition et 'french bashing' dans certains tabloïds anglo-saxons sont autant d'éléments qui auraient pu dissuader les financiers de la City de venir à Paris et pourtant il n'en a rien été jusqu'à présent », fait remarquer un autre recruteur en finance pour qui la capitale française reste malgré tout une destination de choix. L'avenir dira qui a raison...
Si vous aussi souhaitez réagir en tant que professionnel de la finance, n'hésitez pas à nous donner votre point de vue dans la rubrique commentaires au bas de cet article...
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Credit photo : Cunaplus_M.Faba / gettyimages