Pourquoi la plupart des jobs bancaires en front-office resteront à Londres jusqu'en 2021, hard brexit ou pas
Alors que le Brexit semble prendre une mauvaise tournure (avant des jours meilleurs ?), les professionnels de la finance londoniens pourraient à juste titre être tentés de penser qu'ils seront transférés vers Paris et Francfort dès le début 2019. Ce pourrait bien être le cas pour les vendeurs mais pour la plupart de ceux travaillant dans le front-office, il faudra encore quelques années avant de voir leurs jobs être déplacés massivement
Les gouvernements européens, qui ne sont pas encore plongés dans le chaos, sont à l'origine d'un certain répit. Par exemple, fin novembre, le ministère fédéral des Finances a discrètement introduit des modifications législatives autour du Brexit afin de minimiser les effets d'un Brexit sans accord. La France a fait la même chose une semaine plus tôt.
Comme l'a souligné le cabinet d’avocats Clifford Chance, l’autorité fédérale allemande de surveillance financière ("BaFin") aura désormais la possibilité de permettre aux banques et aux gestionnaires d'actifs britanniques de continuer à exercer leurs activités dans le reste de l'UE pendant un temps limité après le Brexit. Même si la Grande-Bretagne quittait l'UE sans accord le 29 mars, le business pourrait continuer pendant encore 21 mois. En France, selon Clifford Chance, des préparatifs similaires sont en cours.
Les dispositions allemandes pour un Brexit sans accord ne couvriront pas tout. "Les transactions conclues après le 29 mars 2019 ne seront appliquées que si elles sont étroitement liées aux transactions qui existaient au moment du Brexit", note Clifford Chance. Le cabinet d'avocats ajoute que le projet de loi allemand ne définit pas le terme "lien étroit" et ne traite pas spécifiquement des services fournis de manière continue. "Cependant, sur la base du raisonnement du projet de loi, la couverture d'opérations antérieures au Brexit ou de certains événements du cycle de vie serait visée", conclut-il.
Les accords français sont encore moins complets et ne peuvent s'appliquer avec certitude qu'aux contrats auxquels des banques étaient "irrévocablement engagées avant le Brexit". "- La France essaie de faire évoluer certaines choses, mais elles sont toujours en place", déclare l'avocat Barnabas Reynolds de chez Shearman & Sterling.
D'un pays à l'autre, les dispositions pays par pays pour un Brexit "sans accord" ne sont pas parfaites, mais les traders seniors affirment que dans le cas de l'Allemagne au moins, elles sont suffisantes pour éviter une ruée vers la délocalisation des activités de trading à Francfort. Dans le cas de la France, les emplois pourraient être déplacés un peu plus tôt (bon à savoir pour les traders de Bank of America).
Quoi qu'il en soit, la pression exercée sur les banques est moins intense qu'on pourrait le croire. Rachel Kent, responsable de la réglementation des services financiers au cabinet d'avocats Hogan Lovells, note que si un accord de retrait est négocié, il y aura un accord de transition en place qui durera jusqu'en 2021. Le cas échéant, les dispositions des différents pays pour un Brexit sans accord entreront en vigueur. « Le principal problème des banques est la perte de passeport, ce qui retarde le moment où cela se produit », explique Rachel Kent.
Il y a beaucoup de rumeurs sur les emplois bancaires à Londres et sur le Brexit, notamment sur le fait que les traders sont invités à signer des contrats leur demandant de se rendre en Europe à brève échéance et que d'autres ont jusqu'au début janvier pour se décider. Il y a aussi des affirmations selon lesquelles le Brexit n'a pas entraîné de transfert massif d'emplois bancaires hors du Royaume-Uni, comme prévu initialement. Les deux semblent fausses. Les emplois vont bouger, mais quel que soit le chaos provoqué par le Brexit, les banques ont de bonnes raisons de ne pas les transférer tout de suite.
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