Ce VP français de JPMorgan devenu expert en COVID-19
Depuis le début de la pandémie de COVID-19 début mars, tout le monde s’évertue à tenter de comprendre le nouveau jargon de la virologie. Les traders passent Stat News au peigne fin pour trouver des informations sur les vaccins et les épidémiologistes du dimanche sont maintenant en mesure de soutenir une discussion autour du R0, autrement dit le taux de reproduction du coronavirus. Mais un ancien VP français de JPMorgan a pris plusieurs longueurs d’avance.
Nicolas Granatino ne travaille plus dans la banque depuis longtemps. Il y a passé huit ans, de 1995 à 2003, et a quitté le secteur pour se lancer dans un doctorat en chimie biologique à Oxford. Une évolution de carrière certes improbable, mais qui le place finalement en excellente position pour commenter la pandémie et ses impacts sur les marchés et sur l’économie.
« C’était très audacieux, » reconnaît Nicolas Granatino en revenant sur sa décision de quitter la finance pour un doctorat non financé – du moins pour la première année. « C’était une véritable remise à zéro et un nouveau départ pour ma carrière. »
Nicolas Granatino a commencé chez JPMorgan à Londres, où il était banquier sur les marchés émergents. Parti ensuite à New York pour participer à la direction du « Lab Morgan », un des premiers accélérateurs de JPMorgan à investir dans l’environnement fintech et capital-risque. C’est là qu’il a rencontré la biotechnologie et pris conscience que sans doctorat, il manquait d’une réelle crédibilité. « Même si j’avais fait des études scientifiques, les gens me regardait en disant que je n’avais jamais travaillé en labo, » raconte-t-il. Lorsque JPMorgan a fermé le Lab Morgan, il a pris contact avec le professeur d’Oxford qui avait fondé la société de biotechnologie dont il s’occupait, et a passé les six années suivantes à préparer sa thèse, en partie sous la direction de Sir Peter Ratcliffe, l’un des futurs Prix Nobel de médecine 2019 pour ses travaux sur l’hypoxie.
Par une sorte de caprice du destin démontrant qu’on ne peut jamais vraiment présager de l’avenir, Nicolas Granatino n’a finalement pas utilisé son nouveau diplôme pour devenir investisseur en biotech : il a rencontré Pierre Andurand, le trader français en produits pétroliers, également directeur de hedge fund et investisseur. Collaborant d’abord avec lui sur des « investissements passion », il l’a ensuite détourné de la biotech, un secteur à la fois très gourmand en capitaux et très risqué. « Au lieu de cela, nous nous sommes tournés vers les plateformes éducatives et média. »
L’une d’entre elle est Cronycle, une plateforme payante, agrégateur de contenus publiés sur le web et organisés en fils d’infos personnels. Nicolas Granatino a organisé sa propre page COVID-19. Il diffuse également sa propre newsletter COVID-19, dont l’audience ne cesse de croître, nourrie par sa double expérience d’universitaire et de financier et investisseur.
« Bon nombre de mes amis restés dans la banque y ont souscrit et l’apprécient beaucoup, » dit-il. « L’idée est de faciliter l’accès aux informations biomédicales et de couvrir les problématiques impactées par la COVID-19. » La newsletter est gratuite pour tous les contenus traitant de la pandémie et il n’a pas l’intention de la rendre payante. « Les média sont divisés autour de la COVID-19. C’est politique parce que c’est leur façon de faire de l’argent – il n’y a pas d’éducation universelle, » ajoute-t-il. C’est ce qu’il essaie de rectifier.
Face à la levée des confinements, Nicolas Granatino fait partie de ces scientifiques qui considèrent que les gouvernements prennent un risque. « En Chine, le confinement a duré 76 jours. Ici [au Royaume-Uni, où il vit - NDLR], il a été beaucoup plus court et beaucoup moins strict ; et de surcroît, le gouvernement émet des messages contradictoires, » dit-il. « Nous verrons dans les deux semaines qui viennent comment le virus se comporte – nous avons toujours plus de 1 000 nouveaux cas par jour et si le taux de transmission repasse au-dessus de 1, le phénomène peut vite redevenir exponentiel. »
Si c’est le cas, Nicolas Granatino pense que nous verrons se succéder des périodes de confinement comparables à celles prévues par Imperial College en mars : « ce ne sera pas pire en juillet qu’en avril, mais il faudra être réactif aux poussées successives. » Avec un danger supplémentaire : la confiance dans le gouvernement s’effrite et les gens n’accepteront pas d’être à nouveau confinés.
Pendant ce temps, il conseille à ses anciens confrères banquiers de porter un masque dans les espaces clos et de maintenir autant que possible une forme de confinement personnel. Lui-même a été touché par le virus – contaminé par un médecin à la mi-mars, et s’est porté volontaire pour participer à une étude suivant l’évolution de ses anticorps.
« La science fait très bien son travail, mais il y a encore beaucoup d’inconnues autour de cette maladie et de ses effets à long terme, » ajoute-t-il. « Ce n’est pas très moral de dire ‘Exposons tout le monde au virus et essayons de protéger les gens’ quand il y autant d’inconnues. »
Crédit photo : Yohann LIBOT sur Unsplash
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